
Comment Yellow Studio a donné vie à la scénographie monumentale de la tournée de Shakira
Alors que Shakira parcourt les stades du monde entier avec sa tournée Las Mujeres Ya No Lloran, l’un des éléments les plus spectaculaires du show reste sans aucun doute sa scénographie monumentale. Pour concevoir cette mise en scène ambitieuse, Shakira s’est entourée de Yellow Studio, une agence de design de renom dirigée par Julio Himede. Dans une interview exclusive accordée à Billboard, le créateur revient sur les coulisses de cette collaboration unique et dévoile les secrets de fabrication d’un spectacle à la hauteur de l’icône mondiale qu’est Shakira. Découvrez ci-dessous la traduction complète de cet échange passionnant.
Comment Yellow Studio a donné vie à la scénographie monumentale de la tournée de Shakira
Julio Himede, fondateur de Yellow Studio et notre « Star de l’ombre » d’avril, partage comment les fans ont été invités à se sentir « membres de la meute » pendant le Las Mujeres Ya No Lloran World Tour.
Par Isabela Raygoza
10/04/2025
Dans notre rubrique The Stars Behind the Stars, les rédactions de Billboard Latin et Billboard Español racontent des histoires encore jamais révélées, en donnant la parole à ceux qui œuvrent dans l’ombre. Ce sont les héros méconnus mais essentiels à l’équipe d’un artiste. Aujourd’hui, nous mettons à l’honneur Julio Himede, fondateur de Yellow Studio.
Pour sa tournée mondiale Las Mujeres Ya No Lloran, la superstar colombienne Shakira a fait appel à Yellow Studio pour créer une scénographie monumentale. Chargée de traduire les thèmes de résilience, d’émancipation et d’identité, l’agence de design basée à New York a conçu une expérience visuelle saisissante, riche en éléments transformateurs et en narration émotionnelle.
« Shakira nous a décrit son souhait d’un écran monumental et épuré où elle pourrait projeter les messages de son dernier album », explique Julio Himede à Billboard Español. Avec le designer principal Damun Jawanrudi, l’équipe a collaboré étroitement avec l’artiste pour que chaque détail — des gigantesques écrans vidéo jusqu’à la pièce maîtresse gonflable en forme de louve — reflète sa vision et captive le public.
Spécialisée dans la création de scènes pour des célébrités internationales et des événements de grande envergure, Yellow Studio a notamment signé celles des Grammy Awards, du Concours Eurovision 2023, des BAFTA 2024 ou encore des MTV VMAs. Grâce à une équipe soudée de designers, architectes, maquettistes et responsables de production, l’agence transforme la vision des artistes en réalité. « Le concept tournait autour de la résilience et de l’émancipation », explique Himede, notant que l’album de Shakira a inspiré les visuels du spectacle, notamment par l’usage métaphorique des pierres précieuses, symboles de force et de transformation.
Dans cette interview, le designer salvadorien-australien revient sur la genèse créative de la tournée de Shakira et explique comment l’équipe a voulu capturer un sentiment d’appartenance, en transformant la scène en une métaphore puissante de survie et de courage, tout en renforçant la connexion entre la chanteuse et ses fans.
Quand avez-vous commencé à travailler avec Shakira ?
On a commencé il y a environ un an, en mars ou avril. Nous avons pris l’avion pour Miami afin de rencontrer Shakira et ses directeurs artistiques, The Square Division, pour la première réunion. Du côté de Yellow Studio, j’étais présent avec Damun Jawanrudi. Elle voulait un écran monumental, épuré, sur lequel projeter les messages de son dernier album. Dès le début, la collaboration a été étroite et enrichissante. Shakira était très impliquée, avec une vraie sensibilité visuelle.
Comment avez-vous lié le design de la scène aux thèmes de son album ?
Comme pour tous nos projets, on a commencé par des recherches poussées, ce qu’on appelle « la Bible ». On a écouté Las Mujeres Ya No Lloran, décrypté les significations et le concept global. Le thème central est la résilience et l’émancipation des femmes, avec beaucoup de métaphores autour des pierres précieuses — symboles de solidité et de transformation. Ce concept a nourri beaucoup des visuels du spectacle.
Pouvez-vous nous parler de certains morceaux spécifiques ?
« Te Felicito » ouvre le spectacle. On commence par des tons terreux, des visuels évoquant le désert et les pierres précieuses, représentant une femme renaissant de la terre. L’esthétique est sobre et organique. Pour « Te Felicito », on s’est inspiré du clip, que Shakira aime particulièrement. On a intégré des accessoires vibrants, et la scène est passée à des teintes monochromes de rose et de violet — symboles de séduction et de franchise.
Un autre moment marquant, ce sont les visuels pour « La Loba », alias She Wolf.
La louve est centrale dans l’identité de Shakira. Les fans se considèrent comme membres de sa « meute », un concept qui a pris de l’ampleur au fil des années. Pour elle, la louve est plus qu’une métaphore musicale, c’est un symbole personnel fort. On voulait donc capturer ce sentiment d’appartenance — montrer qu’en venant au concert, on devient membre de la meute, et Shakira est La Loba.
Ce thème traverse tout le spectacle, qui dure deux à trois heures. Dès le début, des visuels montrent une louve accompagnée de deux louveteaux, évoquant Shakira et ses deux fils. Plus tard, on entend des hurlements intégrés à la musique. Et pour l’apothéose, lorsqu’elle interprète She Wolf, une énorme sculpture gonflable représentant une louve majestueuse s’élève sur scène, devenant le centre du spectacle — une image forte de résilience et de survie.
Quel a été le rôle de Shakira dans le processus créatif ?
Très impliquée. Elle savait exactement ce qu’elle voulait. Elle est incroyablement professionnelle — pas seulement en tant que danseuse ou chanteuse, mais aussi comme artiste qui comprend parfaitement ce que ses fans attendent. Elle voulait proposer quelque chose de nouveau, une expérience unique.
Dès le départ, nous avons pensé à une scène modulable, propre, monumentale — mais avec des éléments transformables sur lesquels elle puisse danser, interagir.
Nous avons commencé avec des croquis et des maquettes. On a présenté trois ou quatre maquettes à l’échelle, comme une maison de poupée. Shakira les manipulait elle-même : elle découpait, assemblait, testait différentes configurations.
Nous avons exploré des idées comme des plateaux hydrauliques, des éléments mobiles ou rétractables, et un long passerelle (extension de scène). Les écrans vidéo jouent un rôle majeur : gigantesques, ils peuvent s’ouvrir, s’élever, redescendre, et projeter aussi bien des paysages que des effets de lumière très impactants.
La tournée El Dorado avait une structure coûteuse à transporter, notamment le serpent géant. Qu’avez-vous appris de cette expérience ? (NDLT : L’interviewer fait en réalité référence au serpent du Tour Of The Mongoose)
Beaucoup de membres de l’équipe travaillent avec Shakira depuis longtemps. Leur expérience nous a été précieuse. La louve géante, par exemple, est une structure gonflable qui tient littéralement dans une valise. En 15 secondes, elle se déploie pour atteindre 9 mètres de haut. C’est fou ce que la technologie permet aujourd’hui. Cela facilite le transport tout en conservant un effet spectaculaire.
Qu’est-ce qui, selon vous, touche le plus les fans pendant le concert ? Quel est le moment fort ?
Shakira connaît ses fans mieux que quiconque. Elle sait doser l’énergie des morceaux pour faire monter la tension, puis calmer avec des moments acoustiques ou a cappella. Que ce soit devant 120 000 personnes à São Paulo ou 60 000 ailleurs, elle parvient à créer une connexion totale.
Quand elle chante depuis la passerelle, c’est un moment immersif. On a aussi distribué des bracelets lumineux multicolores. Ce n’est pas nouveau, mais ça renforce l’idée de communauté, d’être dans la meute. Une manière ludique de faire sentir à chacun qu’il fait partie de quelque chose de grand.
